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La conscience?

Sous le régime de Zine El-Abidine Ben Ali, l’État s’exprima de force au nom de tous les citoyens et imposa des délimitations précises à des concepts universels. Cependant, après la révolution, l’espace public a été ouvert à de nouveaux débats démocratiques, notamment sur la question de la liberté de conscience. Cette question a provoqué de vives discussions au sein de l’Assemblée constituante, chargée de rédiger une nouvelle constitution instituant une Deuxième République. Pourtant, bien que les délibérations aient abouti à la constitutionnalisation de la liberté de conscience, le concept n’est toujours pas clairement défini.

Ce livre s’inscrit dans le contexte plus large du débat, et comprend des contributions préparées par un groupe d’éminents intellectuels tunisiens dans le cadre de la première édition du ” Forum Hechmi Troudi pour la liberté de pensée et de conscience”. Le forum s’est tenu les 15 et 16 avril 2017 dans la ville de Nefta, ville natale de Troudi (1944-2015), en partenariat avec le Bureau de Coopération Académique de la Fondation Rosa Luxemburg.

Le forum a été présidé par Abdelmajid Charfi, tandis que le livre a été coordonné par Abdelkarim Gabous. Outre un document de travail intitulé «Liberté de pensée et de conscience: quelle approche dans le cadre des transformations arabes et islamiques?», Le livre comprend neuf autres documents et une introduction, le tout en 159 pages.

Le document de travail établit les raisons qui ont motivé le choix de lier la question de conscience au journaliste et auteur Hechmi Troudi, qui a subi «la problématique de la liberté de conscience», étant issu d’une école islamique traditionnelle et s’impliquant plus tard dans le mouvement de gauche, ce qui lui a permis de mêler «laïcité stricte et islam» sans être obligé d’abandonner l’un ou l’autre.

Le président de l’Académie Tunisienne «Beït al-Hikma», Abdelmajid Charfi, , a déclaré qu’il était essentiel de renforcer la liberté de conscience. Il tenta d’expliquer le passage de sociétés traditionnelles fondées sur la simulation et la hiérarchie, à des sociétés modernes et l’apparition d’une «autonomie individuelle» et les valeurs et principes associés, notamment la «liberté de conscience». Contrairement à la contribution de Gabous intitulée «Notre cheikh Hechmi Troudi: le premier enseignant», le reste des articles traite de questions générales sous différentes perspectives.

S’appuyant sur des interprétations juridiques et sur son expérience personnelle en psychanalyse, Raja Ben Slama tente, dans son texte «Qu’est-ce que la liberté de conscience en Tunisie», de clarifier le sens du concept en mettant en lumière certaines intersections négligées entre religion, genre et identité culturelle. Quant à Mohammed Cherif Ferjani, il insiste dans son article «Corps et liberté» sur l’idée que la liberté du corps doit être l’une des principaux prérogatives. Par ailleurs, à travers son texte «Les femmes et ce qu’ils considèrent comme sacré: un appel à la révision des présupposés», Neila Sellini analyse les interprétations religieuses qui maintiennent encore l’infériorité de la femme.

Dans une perspective philosophique, Hamadi Redissi met également l’accent sur la «liberté de conscience» qu’il considère comme «silencieuse, illimitée et souffrante». Quant à l’article de Ahmed Guesmi, il est centré sur «Les artistes tunisiens et la liberté de conscience: obstacles constitutionnels et non constitutionnels». Dans son texte intitulé «Chiites, communistes et conscience», l’écrivain et cinéaste irakien Kassem Hawal examine les évolutions de sa vie et de sa riche carrière. Enfin, l’écrivain marocain Mohammed Seghir Jinjar analyse le «Deux poids deux mesures et les dimensions du silence de la constitution marocaine sur la liberté de conscience».